Les travailleurs sans papiers rencontrent le consulat d’Algérie : bilan et vidéo inédite
Dans le prolongement de la campagne « Racket sur les cotisations des travailleur(se)s sans papiers », à laquelle se sont désormais ralliées 45 organisations, les travailleurs sans papiers ont été reçus le 3 mars par le consulat d’Algérie.
Lancée en octobre 2008 par Droits devant !!, la campagne « Racket » dénonce l’énorme spoliation commise par l’Etat français depuis au moins quatre décennies.
En effet, la majorité des sans-papiers de France (entre 200 000 et 400 000 selon le gouvernement) sont des travailleur(se)s déclaré(e)s en CDI, CDD ou intérim renouvelé. Ceux-ci paient des cotisations sociales, des taxes et des impôts, sans pouvoir bénéficier des droits et des prestations qui y sont attachés (retraite, allocation chômage, citoyenneté…). Ce racket sur les travailleur(se)s sans papiers permet à l’Etat français d’encaisser sur leur dos des centaines de millions d’euros par an, sans jamais rien décaisser. Quant aux autres sans-papiers, contraints au travail dissimulé (dit « au noir »), ils contribuent, comme toute personne vivant en France, à la principale recette fiscale : la TVA.
C’est dans ce cadre que, depuis deux ans, nous interpellons les consulats de onze pays. Nous leur demandons de ne plus se rendre complice de ce racket et de ne plus fournir à la police française les laissez-passer provoquant l’expulsion de leurs compatriotes sans-papiers.
Ce message, nous le transmettons à nouveau au consulat d’Algérie le jeudi 3 mars (la réunion n’ayant pu se tenir le mardi 1er mars pour des raisons non élucidées à ce jour). Une délégation de six personnes (composée de camarades du CSP 17e, de l’ATMF, de la coordination 93, de Solidaires et de Droits devant) est reçue pendant une heure et demie par le consul adjoint responsable du service juridique, M. KOUACHI.
Dans un premier temps, la délégation rappelle les objectifs de la campagne racket et souligne la dégradation du climat politique, la répression à laquelle sont en butte les sans-papiers s’étant durcie. La délégation conclut solennellement cette intervention en demandant au consulat l’arrêt de la délivrance des laissez-passer.
Le consul adjoint répond qu’en tant que représentant officiel d’un pays souverain, il est tenu au respect des accords bilatéraux. Il parle de « rapatriement » et non d’ « expulsion » de ses ressortissants et estime que le consulat doit « rapatrier », à moins d’un abus flagrant. Sa définition de l’ « abus » semble liée à la durée du séjour : si le sans-papiers concerné est en France depuis au moins 10 ans, le consulat est enclin à ne pas émettre le laissez-passer.
Lorsque la délégation parle de l’article 40 (régularisation par le travail), auquel les Algériens n’ont pas droit, le consul adjoint admet spontanément qu’il s’agit d’une discrimination flagrante, mais que le consulat ne peut rien faire.
Lorsque la délégation (Ali de l’ATMF) informe le consul adjoint que l’Algérie est le pays qui délivre le plus de laissez-passer (40 à 50%, soit environ 3000 algériens reconduits à la frontière chaque année), notre interlocuteur, gêné, ne dément pas. Suite à cette information, le Consul adjoint tient deux positions contradictoires :
d’une part, il se plaint de la façon dont la France traite l’Algérie et établit un lien judicieux avec la période de colonisation : avec un certain « humour », il dit que, les Français étant restés 132 ans en Algérie, des sans-papiers algériens pourraient aussi rester quelques années en France. Il semble par ailleurs très à l’écoute lorsque notre camarade de la coordination 93 lui tend sa déclaration d’impôt, démontrant que les sans-papiers sont des citoyens qui peuvent payer des impôts (en l’occurrence, 700 euros), et qu’en retour ils n’ont droit qu’à être pourchassés.
d’autre part, il estime que le consulat doit avant tout protéger les 700 000 Algériens présents en France en situation régulière, plutôt que de se consacrer à quelques délinquants sans-papiers qui ternissent l’image des Algériens. Ces propos insultants pour l’immense majorité des sans-papiers, qui sont honnêtes, sont vivement reprochés au consul adjoint par la délégation.
La délégation quitte le consul adjoint en lui expliquant que seule une régularisation globale peut sortir les sans-papiers de cette situation d’exploitation. La délégation encourage le consul adjoint à informer l’ambassadeur de notre entrevue.
LA LUTTE CONTINUE ET NOUS NE NOUS ARRÊTERONS PAS AVANT LA RÉGULARISATION GLOBALE DE TOUTES ET TOUS LES TRAVAILLEURS SANS PAPIERS
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